source : Athletic

Le but à Turin ..

Il y a 40 ans, le 23 Avril 1980, les supporters de la Juve sont déjà en train de célébrer en tribune leur qualification en finale de la Coupe de Vainqueurs de Coupe. Après avoir fait nul 1-1 à Highbury, le match se dirige vers un nul 0-0 qui qualifierait les turinois grâce à la règle du but à l’extérieur. Alors Terry Neill et Don Howe se retournent et demandent au jeune n°13 de se préparer à rentrer. « Allez fiston » lui dit Howe, « marque nous un but ». Le jeune d’habitude très confiant et arrogant devient alors très nerveux. « Dépêche toi ! » le physio Fred Street s’impatiente. « Le match sera terminé avant que tu rentres ».

Alors qu’il ne reste plus beaucoup de temps, il peine à se mettre en évidence face à une des défenses les plus solides d’Europe. Soudainement, à la 88ème minute, un débordement côté gauche. Graham Rix fait un une deux avec Frank Stapleton et élimine Claudio Gentile pour la première fois de la soirée. Rix élimine ensuite le grand Gaetano Scirea et centre au second poteau. Le ballon est hors de portée pour Alan Sunderland et le légendaire gardien Dino Zoff. Et à la surprise de tout le monde, le jeune joueur se retrouve là à glisser le ballon dans les filets. Le Stadio Communale est plongé dans le silence. Paul Vaessen, un gamin de 18 ans du Bermondsey dans le sud de Londres envoie Arsenal en finale de la Coupe de Vainqueurs de Coupe. Après le match il déclare aux journalistes « la nuit dernière, j’ai rêvé que je rentrais et que je marquerai le but vainqueur. J’arrive pas à croire que ça se soit réalisé. »

Le stade était sous le choc, comme les joueurs, dont des champions du monde italiens. Ils étaient invaincu à domicile depuis des années. C’était à l’époque une des plus grandes victoire d’un Club anglais à l’extérieur en Coupe d’Europe. Au retour à l’hotel, Terry Neill laisse ses joueurs célébrer, la bière coule à flot, puis le vin et enfin le champagne. Un des joueurs trouve un buggy, et devant ses coéquipiers hilares, il fait le tour de l’hotel nu. « C’était une soirée d’enfer » se rappelle Sunderland. En rentrant chez lui à Bermondsey, habituellement un territoire de fans de Millwall, Paul Vaessen est accueillit en héro. Il est sur un nuage, il dit à sa mère « je crois que j’ai réussit maman ».

La fin de carrière ..

Paul Vaessen avait fait ses débuts en équipe première à l’âge de 16 ans, avant ce but a Turin il avait déjà marqué 5 buts dont le but vainqueur lors d’un derby face à Tottenham. A la fin de la saison, Vaessen ne participe pas à la finale de la Coupe de Vainqueurs de Coupe (perdue aux penaltys face à Valence). Cependant il a un brillant avenir devant lui, Brian McDermott se rappelle « Il était un bon avant centre, il avait de la taille, il pouvait garder le ballon, il était mobile, bon finisseur. On était coéquipiers en réserve, et Vas, Raphael Meade et moi on était en concurrence pour une place en équipe première. »

Le lendemain de cette victoire historique, dans le Evening Standard, on peut lire « peut importe ce qui se passera dans le reste de sa carrière, il est peu probable qu’il vive un souvenir aussi précieux que le soir où il marque le but qui qualifie Arsenal en finale de Coupe de Vainqueurs de Coupe ». Une prophétie.

Le 3 Novembre 1981 à Highbury, une autre soirée européenne, Arsenal rencontre le KFC Winterslag. Contre toutes attentes, les Gunners ont perdu 1-0 au match aller. Ce jour là à Highbury, les fans d’Arsenal horrifiés voient les belges ouvrir le score à la troisième minute. Le match sera finalement remporté 2-1 mais Arsenal est éliminé par la règle du but à l’extérieur. Une soirée des plus humiliante, et particulièrement terrible pour Vaessen. Revenant d’une grave blessure au genou, il peine à trouver le rythme du match, et les fans d’Arsenal s’en prennent de plus en plus à lui. McDermott se souvient, « ça a du être sacrément dur pour lui. Honnêtement, ça l’était pour nous tous, mais Vas, pour une raison ou une autre, a été pris pour cible. On entendant de plus en plus « Vaessen Off, Vaessen Off ». Je crois que ça devenait tellement grave qu’il a été sortie vers la 50ème minute. Pour un jeune joueur qui débute dans le Football ça a du être très dur ».

Pendant ce temps là, son jeune frère Lee en vient aux mains avec les fans d’Arsenal qui s’en prenaient à Paul Vaessen. Leon, son père, est allé retrouver Paul, en pleure, au vestiaire. Paul Vaessen a dit plus tard à Jon Spurling pour son livre Highbury : The Story of Arsenal in N5 « c’était une humiliation totale et complète ».

Quand on évoque la carrière de Paul Vaessen à Brian McDermott, c’est la soirée contre Winterslag plutôt que celle à Turin qui lui revient en mémoire. « Quand on considère sa carrière de joueur, il a connu un haut gigantesque à Turin, et un bas gigantesque aussi contre Winterslag. Deux extrèmes : nord, sud. Je ne suis pas sûr qu’il ait récupéré de ça. » Il disparaît de l’équipe première pendant 2 mois après ce match, puis il fait son retour après le nouvel an, marque quelques buts, mais c’était un faux retour. Après une défaite contre Swansea en Février il ne fera plus aucune apparition en équipe première d’Arsenal. Pendant l’été 1983, alors que les fans d’Arsenal célèbrent la signature de Charlie Nicholas, dans l’indifférence totale c’est la fin de carrière de Vaessen.

Sa mère, Maureen Vaessen se souvient : « J’étais dévastée pour mon garçon. Qu’on vous dise à 21 ans que vous ne pourrez plus jamais jouer au Football, il était dévasté ». Tout commence par sa blessure au genou contre Tottenham en Février 1981, une déchirure des ligaments médian et croisés de son genou gauche. Il surprend le staff d’Arsenal en parvenant à revenir dans le groupe pour la pré-saison de la saison suivante, mais il n’est plus jamais le même joueur. « Les choses n’étaient plus jamais les mêmes après ça, tout s’est effondré très rapidement ».

Son addiction aux drogues dures ..

Un an plus tard, la femme de Paul, Sarah, appelle Maureen pour venir discuter. « Ils sont venu mais Paul n’était pas là, j’ai senti que quelque chose n’allait pas. On s’est assit et Sarah s’est mise à pleurer. Sa mère m’a dit la vérité, « je suis désolé de devoir vous l’apprendre Maureen, mais Paul est drogué. Il va très mal ». C’était un choc terrible. Quand elles m’ont dit que c’était l’heroin, je suis devenu folle. Je ne connais rien aux drogues, mais je savais que l’heroin c’était très mauvais ». Paul Vaessen était déjà plongé dans l’addiction, si ce n’était pas l’heroin, c’était tout ce qui pouvait lui tomber sous la main – cocaine, anti-douleurs, tranquillisants, médicaments … ça lui coutait £200 par jour – la somme versée par Arsenal suite à la fin de sa carrière était rapidement dépensée. Alors il s’est mit à vendre toutes sortes d’objets appartenant à la famille. Ca a détruit son mariage et sa famille.

Un de ses amis de l’époque se souvient. « On était un groupe en vacances à Malte, avec Paul et Sarah, dans les années 80s. A l’époque il était au top à Arsenal, les gens le reconnaissaient. Quand je l’ai revu quelques années plus tard, il était méconnaissable, tellement maigre, la peau sur les os ». Alors il revenait à Highbury les jours de match, essayant de trouver le chemin vers les vestiaires – soit pour trouver désespérément de la compagnie, soit pour récupérer des objets qu’il pourrait revendre, personne ne sait exactement. Stewart Robson était joueur à l’époque. « On pouvait voir vu son apparence qu’il allait très mal. Je me rappelle que Terry Neill et Don Howe devait le pousser vers la sortie du vestiaire, demander à la sécurité et à la police de l’empêcher de passer ».

Gary Lewin était un jeune joueur de la même génération à Arsenal, lui aussi a connu une carrière écourtée, il est devenu ensuite physio. Alors qu’il étudiait à Guy’s Hospital en Mars, il apprend qu’un ancien joueur d’Arsenal est en soin intensif après avoir été poignardé. « J’étais sous le choc. J’avais joué quelques matchs en réserve avec lui. Je savais qu’il avait pris sa retraite, mais je n’avais plus eu de nouvelle depuis. Je ne savais certainement pas qu’il était dans le monde de la drogue. Je suis alors allé le voir, il était inconscient, en sédation profonde, il était vraiment mal en point ». Paul Vaessen a été poignardé 3 fois à East Street Market, dans le sud de Londres, pour une dispute autour d’un deal de £200 de drogue. Il a subit une rupture de la rate, de l’intestin inférieur, et un poumon a été percé. Il avait besoin de 20 litres de sang et 144 points de suture. Maureen Vaessen : « C’était terrible de le voir comme ça. Je ne sais pas comment il en est sortit mais il a réussit. Puis, dès qu’il est sortit de l’hôpital, vous savez ce qu’il a fait ? Il est directement revenu voir la personne qui l’a poignardé – qui l’a presque tué – pour le demander de la drogue.

Je n’arrivais pas à y croire. J’essayais de lui parler mais il n’écoutait pas. C’était comme ça pendant des années. Je le considérais comme quelqu’un de fort mais il était addict et c’était horrible. Ca a crucifié notre famille. Pendant cette même période, mon mari est partit. Je n’arrivais pas à supporter ce qui se passait. J’ai perdu 20kg en l’espace de 4 semaines. Tout s’est effondré. »

Le quotidien d’un drogué ..

Paul Vaessen créait des problèmes partout où il passait. Quand il a eu un job à la poste, il a été viré quand ils ont découvert qu’il cherchait à intercepter les cartes de crédit avec leurs codes. Quand il vendait des appareil électroménager, il a trouvé un moyen d’en vendre au black. Quand il a été livreur de fleur, il a été trouvé défoncé, dans l’intérieur du van, couché sur les bouquets de fleur. Finalement son meilleur travail c’était dans l’attraction du Donjon de Londres où il était déguisé pour faire peur aux touristes en visite. Malgré tout, il a été pris en train de faire les poches des touristes, tout faire pour récupérer de quoi payer sa drogue. De temps en temps, il disait vouloir retrouver le droit chemin. Il a rencontré Debbie qui devient sa femme, avec qui il a un fils Jamie. Il a fait un long séjour à l’hôpital pour désintoxication, puis en hôpital psychiatrique. Après ça, il était rafraîchit, revigoré, transformé. Puis à chaque fois il rechutait.

En 1993 il se sépare de Debbie, il décide alors de nouveau de faire le ménage dans sa vie. Il part de nouveau pour l’hôpital. « Il a été clean pendant 18 mois » raconte sa mère. « Il était totalement différent. On pensait que le pire était derrière lui. Mais tellement de fois on a cru ça ». Il se marie à nouveau, avec Sally, avec qui il a un autre fils, Jack. Il se met de nouveau à travailler, et à reprendre des études. Il voulait devenir physio comme Gary Lewin. Il avait enfin un but dans sa vie et des raison de rester loin de la drogue. En 1994 il se sent suffisamment confiant pour accorder une interview à News Of The World, pour parler des problèmes qu’il a connu et des leçons qu’il en a tiré. Il a aussi parlé de son départ d’Arsenal. « Quand les portes d’Highbury se sont fermés derrière moi, je n’avais aucune idée de quoi faire de ma vie. J’étais qu’un tas de ferraille, plus d’utilité pour personne ».

C’est ce sentiment d’inutilité et de rejet qui l’a poussé vers la drogue selon lui. Il se rappelle de sa première expérience avec l’heroin qui l’a rendu malade, mais ça l’a quand même rendu accroc. Et très rapidement, il se sentait incroyablement vide, jusqu’au moment où il se fait un fix. Il exprime ses regrets par rapport à tout les gens qu’il a pu blesser, qu’il a volé. « Je volais tout ce qui me tombait sous la main ». Il se disait un homme nouveau, changé. « Pendant toute ma vie j’ai cherché quelque chose qui me manquait. Finalement je me suis tourné vers le Christ. Maintenant je prends mes responsabilités. Je suis encore dans un processus de guérison, mais j’ai un but, un espoir dans ma vie, je peux faire face aux choses sans l’aide de la drogue ».

Après une opération au genou en 1997, il se déplaçait en chaise roulante, puis sur des béquilles. Mais il sortait rarement de son appartement. Il a alors été atteint de dépression et est devenu dépendant aux anti-dépresseurs et anti-douleurs. Son comportement devenait de nouveau erratique. En 1998 il est arrêté pour avoir volé une paire de collants dans un supermarché, il a ensuite été accusé d’aggression sur le policier, même si après un appel cette accusation a été annulée. Son état décline, il est arrêté pour conduite en état d’ivresse, puis pour vol. Inévitablement son mariage en a souffert.

Dans le livre Stuck in a Moment, la superbe biographie écrite par Stuart Taylor, on apprend aussi à quel point il a fait souffrir les gens qui l’entourait. Notamment son frère Lee qui l’a suivit dans son addiction aux drogues au débuts des années 90s. Vers la fin de la décennie, Lee qui est revenu dans le droit chemin invite Paul chez lui, à Bristol. Il voulait l’aider à s’en sortir. Mais c’est l’inverse qui s’est produit, c’est Paul qui l’a fait chuter avec lui. « J’ai perdu tout – mon emploi, ma femme, mon enfant, ma maison. J’ai fini par vivre avec Paul. J’avais tout perdu ».

A Bristol, un ami de l’époque se rappelle. « Il avait l’air d’aller bien, il avait des gens différents qui l’entouraient, et j’étais content pour lui. Puis d’un coup il disparaissait. » Il racontait aux gens de Bristol ses exploits sous les couleurs d’Arsenal, mais il perdait de plus en plus pied avec la réalité. Maureen Vaessen : « A un moment il a été retrouvé dans la rue en panique, en train de demander aux gens « Vous avez vu mon frère ? Il a 7 ans. Je dois retrouver mon frère, mon grand père nous attend. » Son frère avait la trentaine et son grand père était mort il y a des années. »

La fin ..

Le 8 Aout 2001, Paul Vaessen a été trouvé mort à l’âge de 39 ans, dans la salle de bain de son appartement à Bristol. Lors de l’autopsie, pleins de différentes drogues sont détectées par les analyses de sang. Dans le Bristol Observer on peut lire : « La drogue met fin aux jours d’un addict ». Pas « ex Star d’Arsenal », ou « joueur de Football déchu », ni « héro de Turin », juste « addict ». Arsenal a exprimé ses condoléances à sa famille et ses proches dans le programme d’un match, un article de seulement 88 mots. On est très loin de l’hommage rendu à David Rocastle en Mars 2001, un autre enfant d’Arsenal.

Quand Taylor a travaillé sur le livre Stuck in a Moment, il s’est rendu compte que certains de ses coéquipiers n’étaient même pas au courant de sa mort. Quand il leur disait qu’il écrivait un livre sur Vaessen, leur réponse c’était « Comment il va ? ». Un des joueurs lui a admit que Vaessen était le mauvais souvenir qu’Arsenal souhaite garder secret, lui exprimant ses doutes à trouver du côté du Club l’aide pour son livre. Seulement c’est l’inverse qui s’est produit, le Club l’a aidé à collecter des témoignages de supporters. Sa famille aussi était inquiète de ce qui pourrait être révélé de douloureux dans le livre. Mais ils ont au contraire été reconnaissant.

« Certaines personnes ne savaient pas comment me parler de Paul avant ce livre, mais je me sens bien mieux pour leur en parler » raconte Maureen. « C’est bien que l’on puisse parler du bon chez Paul – avant sa chute ». Lors d’un événement sur la sortie du livre, à l’Emirates, Maureen a pu rencontrer Tony Adams. Il avait 5 ans de moins que Paul Vaessen, il était à l’Academy quand Paul est libéré par Arsenal. Il trouve chez lui des similitudes avec son histoire. Il a écrit la préface du livre. « J’ai un sourire au visage quand je me rappelle le but de Vas contre la Juventus, mais une larme à l’oeil et de la tristesse dans mon cœur quand un Footballeur et addict ne réussit pas à s’en sortir ». Tony Adams a crée la clinique Sporting Chance en 2000, qui permet aux sportifs de se désintoxiquer de leurs différentes addictions. « Tony a dit que si il avait pu bénéficier de cette aide suffisamment tôt, ça aurait pu sauver Paul, il pensait que Paul serait toujours vivant aujourd’hui ».

Maureen était persuadée que son fils s’est tourné vers la drogue à cause de sa blessure et le rejet d’Arsenal. Mais c’est après sa mort qu’elle a su que l’addiction aux drogues de son fils date de bien avant ces événements, dès l’âge de 14 ans. « Il faisait ce qu’on appelle des expériences. Prendre une tablette de ci, essayer ça, et ça. » Son ancien coéquipier et ami à Arsenal, Nicky Law, actuel responsable de l’Academy de Burnley, se souvient : « Quand Paul et moi on a grandit ensemble, il y avait des tentations, pas toutes bonnes. Est-ce que Paul prenait des drogues quand il était à Arsenal ? Oui. Il y a des choses que Paul testait, je voyais bien ce qu’il faisait. Ca n’a rien changé à notre amitié. J’allais avec lui dans certains endroits, moi j’étais plus sur la retenue par rapport à tout ce qui se passait dans ces endroits. Paul participait à tout. »

Un autre ami d’enfance se rappelle : « Il était pas vraiment drogué à l’époque, il fumait juste un join de temps en temps, prenait un peu de coke occasionnellement. C’est surtout après sa retraite qu’il a été addict, car il était dans un apitoiement sur lui-même. Il y est allé à fond, malheureusement. On a découvert que les gens qui sont vulnérables à l’addiction aux drogues utilisent un événement marquant de leur vie comme déclencheur. La blessure de Paul était son déclencheur. Ce n’était pas juste la gloire et l’adulation, tout s’est écroulé après ça. Il s’est sentit rejeté. »

Law est d’accord sur ce constat. « Paul m’a dit qu’il se sentait abandonné. Il pensait qu’Arsenal aurait du faire plus pour lui. Pas d’un point de vue médical mais financièrement. Il sentait que ses problèmes n’allait qu’empirer après sa retraite. La réalité c’est qu’à l’époque on ne soutenait pas les anciens joueurs comme on le fait maintenant. De nos jours on éduque les joueurs, on s’occupe de leur bien être, on les conseille. Alors qu’à l’époque on venait s’entrainer, puis on rentrait chez nous, il n’y avait aucun suivit. La société était très différente aussi. On est tous fait différemment. Je pense qu’il avait ça en lui. Quand on a ce problème, est-ce que ça disparaît un jour ? Peu importe les événements qu’il a connu, peut-être qu’il aurait quand même connu les mêmes problèmes, comme beaucoup d’autres. On parle de Paul car c’est un Footballeur, mais c’est une tragédie humaine. Quand un homme quitte ce monde trop tôt, c’est juste très triste ».

Concernant sa mort, Maureen Vaessen a des doutes. « Ils ont dit mort accidentelle, mais je me demande si il n’en pouvait plus. Quelques mois avant, il a dit « Lee, je ne serais plus là quand j’aurais 40 ans ». Il a pris des drogues depuis si longtemps, il savait ce qu’il pouvait supporter et ce qu’il ne pouvait plus supporter. Une part de moi se demande. » Puis elle découvre dans le livre Stuck in a Moment que lors du jour de Noël 1980 – avant sa retraite, avant sa blessure, juste quelques jours après cette grande soirée à Turin – Paul s’était coupé au niveau des poignets. « Il y avait une rumeur sur un joueur d’Arsenal qui aurait tenté de se suicider à l’époque, je me dis que ça aurait pu être Paul ».

Elle pensait bien connaître son fils, ses qualités et ses défauts, mais beaucoup de choses lui ont échappé, comme sa tendance auto-destructrice qui a débuté lors de l’enfance. Il a très bien su cacher sa part d’ombre, qui avec le temps a pris le dessus sur lui. « Mes enfants ont eu une bonne éducation. Ils étaient aimés. J’entends les gens dire que c’est la faute des parents. Ce que j’ai envie de leur répondre, c’est que j’espère que la drogue n’entrera jamais dans leur famille, car ça déchire les familles. »

« Lee et moi on a eu une discussion franche au téléphone l’autre soir, très émouvante. Il m’a dit que Paul voulait m’appeler quelques semaines avant sa mort, pour dire qu’il était désolé de tout le mal qu’il a pu faire, mais il n’a pas pu le faire. Donc Lee s’est excusé pour lui. C’est quelque chose que j’avais besoin d’entendre. Je savais que mon Paul n’était pas un ange. Je sais qu’il a fait de mauvaises choses. Je sais qu’il a blessé des gens. Il m’a blessé moi, il m’a tellement déçu. Mais ça reste mon fils. Et je l’aimais, je l’aime toujours. J’essaie de ne penser qu’aux bons moments. Comme quand il est rentré de Turin. Tout Bermondsey chantait son nom. Je me rappelle quand il roulait dans sa voiture de sport, Alfa Romeo, pour m’emmener faire du shopping. »

Elle vient rendre visite à sa tombe au Albin Memorial Garden, et elle trouve dessus une écharpe d’Arsenal, ou des fleures rouges et blanches, laissées par des inconnus. Malgré tout ce qui s’est passé en 40 ans, ces 15 minutes de gloires restent un souvenir marquant dans l’esprit des fans l’époque. « Et ensuite je le gronde. « Paul, stupide, stupide gamin. A quoi tu pensais ? Qu’est-ce que t’as fait de ta vie ? » puis je lui dit que je l’aime, et qu’il me manque terriblement. »